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mercredi 8 juillet 2009

Irréductible amitié maroco-algérienne ?



Irréductible amitié maroco-algérienne ?


A l'est, rien de nouveau ! La formule est un euphémisme. Titre d'un film qui a inspiré beaucoup de journaux à l'époque de la Guerre froide, il illustre pour nous l'état d'inertie dans lequel se trouve de nos jours le voisinage du Maroc et de l'Algérie. Il y a quelques semaines, sans déroger à la débauche de déclarations, d'aucuns se sont fait les confidents d'une décision que le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, annoncerait sous peu : l'ouverture des frontières terrestres avec le Maroc. Nous-mêmes, dans ces colonnes, abondant dans le même sens, nous nous sommes pris à rêver plus qu'une fois, -que la frontière serait anéantie par le poids d'une réalité sociale, politique, humaine enfin. Las ! Chaque jour, comme pour démentir un optimisme de bon aloi, l'autre réalité des barbelés et des miradors dressés de Saïdia jusqu'à Bechar, nous rappelle cruellement qu'il n'est pas bon d'espérer par les temps qui courent.

Nous voilà ramenés à nous-mêmes, autrement dit à nos songes, amers et désenchantés. Ce Maghreb dont on ne cesse de parler, dont on évoque avec des accents homériques la force et la dimension, ce Maghreb incontournable à vrai dire, qui existe et pousse sur les décombres d'un faisceau de paradoxes, présent dans nos têtes et dans nos cœurs, espérance collective partagée par les peuples, eh bien ! C'est une Arlésienne qui surgit pour disparaître aussitôt au gré des caprices et des temporalités, elle nous nargue à temps plein. Elle nous jette par-devers une image de dirigeants incapables de surmonter les naturelles contradictions inhérentes à nos modes de pensées, ou tout simplement à la nécessaire diversité qui constitue la richesse inouïe de nos pays.

A-t-on pris conscience que la frontière entre le Maroc et l'Algérie a été davantage fermée qu'ouverte pendant les cinquante dernières années ? Fermée quasiment depuis la «Guerre des sables» qui avait opposé les deux pays de 1963 à janvier 1969, date à laquelle le Président Houari Boumediene s'est rendu en visite officielle au Maroc et a signé à Ifrane le fameux traité d'amitié et de coopération, elle est ouverte seulement après pendant quatre ans et refermée à partir de 1975 après que le Maroc eût récupéré son Sahara. Rouverte pour quelques mois en 1994 pour disparaître dans la trappe.

Sur cinq décennies, longues et laborieuses, ce ne sont que quelques années seulement où la frontière, cette ligne de démarcation arbitraire, aura été ouverte pour les peuples des deux pays. Or, le plus grave n'est pas qu'elle soit fermée, bloquée et dressée physiquement comme une muraille de Chine. Le plus inquiétant, c'est la fermeture dans les têtes des citoyens des deux bords, dans leur conscience et le sentiment qu'il n'est pour eux d'autres horizons qu'un obstacle insurmontable ! Les militaires algériens, c'est le moins que l'on puisse dire, ont décidé de se battre depuis des lustres contre leur propre destin, ils s'opposent à l'irrésistible mouvement de l'histoire qui se fait, et se fera surtout contre eux, parce que la loi de la biologie ne souffre aucune ambiguïté. Elle est imparable et l'on dira même que les jeunes générations ne sont pas prêtes à s'inscrire dans l'opacité de ce modèle stalinien, érigé par les apparatchiks du régime algérien, peu enclins à l'ouverture et psychorigides et dont le sport préféré reste cette irascible volonté de détruire l'idéal maghrébin.

C'est peu dire que leur attitude – antinomique fort heureusement à la joyeuse espérance du peuple algérien – se marque au sceau de l'incroyable hostilité nourrie à l'égard du Maroc, de ses institutions, de son peuple et de sa candeur même. Soixante années ou presque sont passées et la même rengaine, par une presse interposée à la botte, nous renvoie à nous-mêmes : autrement dit à une hallucinante indifférence. Les frontières ont toujours constitué une réalité territoriale, géographique et juridique. Mais elles sont plus que cela en réalité, elles sont le symbole vivant du rapprochement et de l'interdépendance. La France et l'Allemagne qui ont vécu des décennies, voire des siècles durant sous le régime de l'hostilité, de la méfiance et de la défiance ont fini par raison garder.

Le général de Gaulle et le chancelier Adenauer ont enterré « la hache de guerre » et signé en janvier 1963 le Traité franco-allemand qui a scellé leur réconciliation, instauré une paix définitive et ouvert de nouvelles perspectives à l'Europe. Celle-ci est née des décombres d'une longue confrontation à multiples formes qui plongeait ses racines dans l'histoire commune aux deux pays. Le Président Bouteflika, fils d'Oujda s'il en est, incarne toujours l'espérance de réunification . Il connaît suffisamment la réalité géopolitique maghrébine pour ne pas céder à la tentation du pire que certains, autour de lui, s'efforcent de lui imposer. Son nouveau mandat ne se place-t-il sous le signe de la reconstruction intérieure et de la réconciliation extérieure. Le peupke marocain place en lui beaucoup d'expoirs pour contribuer à ressouder les liens avec les pays voisins, dont le Maroc incarne le pays le plus proche et le peuple marocain le plus intime.

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