Pages

mercredi 15 juillet 2009

Sahara : L’inédit de Barack Obama



Sahara : L’inédit de Barack Obama



Le Président des Etats-Unis écrit au Roi du Maroc. Parmi les sujets abordés, le dossier du Sahara. Un évènement. Dans la lettre que le Président des Etats-Unis, Barack Obama, a adressée au Roi du Maroc, SM Mohammed VI, dont le texte intégral a été rendu public ce 3 juillet, il n’y a que trois petits paragraphes qui soient consacrés au Sahara, sur un total d’une douzaine portant essentiellement sur le conflit du Proche Orient. Mais ces trois paragraphes feront date. Au moins une raison à cela : c’est la toute première fois qu’un Président des Etats-Unis s’exprime, de façon officielle, explicite et engagée sur le conflit du Sahara. Le Président précédant, George Bush, ainsi que son administration, étaient tout aussi engagés dans le processus onusien qui tente de résoudre ce conflit, mais sans aucune prise de position officielle. La démarche de Barack Obama relève de l’inédit. C’est le côté « direct » du nouveau Président des Etats-Unis qu’en chef des démocrates, il a du reste mis en œuvre dans son approche de plusieurs autres dossiers. Dossier des deux Etats israélien et palestinien dont il a parlé à Netanyahu bien qu’en sachant que ce dernier y était formellement opposé. Dossier de l’implantation des colonies juives dont il a demandé l’arrêt (et continue de le faire), même si le sujet fâche. Dossier de l’Iran auquel il propose le dialogue, alors que l’idée même de s’adresser à ce pays, considéré comme le chef de file de l’axe du mal, dresse les cheveux sur la tête, aussi bien à Washington que chez les alliés… Si le style Obama est d’être direct, pourquoi en effet en serait-il autrement dans ses relations bilatérales d’Etat à Etat ? Et, en l’occurrence, dans ses relations avec le Maroc et dans son appréciation d’un conflit qui dépasse ce seul pays pour concerner toute une région (nord Africaine et sahélienne) ? D’autant que, dès son accession à la présidence des USA, Barack Obama a été personnellement et plusieurs fois saisi de ce dossier (différentes pétitions des congressmen américains, correspondance du Roi du Maroc)… Mais l’inédit de la démarche du Président Obama ne tient pas seulement à la forme. Il a trait également au fond. « Je partage votre engagement que les négociations menées sous les auspices des Nations Unies, constituent le cadre approprié permettant de parvenir à une solution mutuellement acceptable, et j'espère que Christopher Ross, un diplomate chevronné ayant une large expérience de la région, pourra promouvoir un dialogue constructif entre les parties », a écrit Barack Obama au Roi Mohammed VI. Tout est dit dans ce paragraphe. Le Président des Etats-Unis estime que « les négociations menées sous les auspices des Nations Unies, constituent le cadre approprié permettant de parvenir à une solution mutuellement acceptable ». Il est (comme le Conseil de Sécurité qui n’a eu de cesse de le rappeler dans toutes les dernières résolutions) pour une solution politique, négociée, sous l’égide de l’ONU. Cela épouse parfaitement les positions du Maroc qui, depuis l’échec de l’organisation d’un référendum au Sahara -après dix ans de blocage pour impossibilité d’identification des votants- répète à qui veut l’entendre que le référendum n’est pas la seule forme d’autodétermination. Ni aux yeux du droit international qui prévoit que l’autodétermination s’exprime autrement. Ni aux yeux de l’ONU qui n’a eu recours au référendum que dans 5 cas seulement (et avec quel résultat, parfois… Il n’est que de voir le désastre qui a suivi le référendum au Timor oriental). Le Président Obama dit aussi espérer que Christopher Ross, l’envoyé personnel du Secrétaire Général au Sahara, « pourra promouvoir un dialogue constructif entre les parties ». Or, le chef de l’Etat américain sait en quoi consiste la mission de Christopher Ross. Elle consiste à mettre en œuvre les dernières résolutions du Conseil de Sécurité, lesquelles sont claires. Elles préconisent, encore une fois, solution politique et dialogue, dans le cadre des derniers développements qu’a connus le dossier, c'est-à-dire : la proposition marocaine d’autonomie élargie (non pas en tant que projet ficelé, mais en tant que projet à discuter), les négociations de Manhasset, etc. Enfin, un dernier aspect inédit de la démarche de Barack Obama, le fait que le chef de l’Etat américain s’engage officiellement et ouvertement à ce que son gouvernement travaille avec le Maroc et d'autres parties dans la région pour parvenir à une solution. Ce n’est plus de l’ONU qu’il parle, mais des Etats-Unis. Le dossier du Sahara prend désormais une autre dimension. Quelles conclusions sur ce positionnement de Barack Obama ? Le Maroc a rendu public la lettre sans aucun commentaire officiel. Ceux qui en attendent un ne connaissent pas le pays. Barack Obama a écrit dans cette lettre qu’il espérait « avoir l'occasion de discuter » avec le Roi du Maroc « de toutes ces questions » (Proche Orient, Sahara, relations avec les Etats-Unis). Le Maroc officiel n’ajoutera rien. Une chose est sûre, ce positionnement n’est pas pour combler de joie la partie adverse. Ses commentaires en attestent. Le Polisario a aussitôt remis en avant ses « menaces » de reprendre les armes et les attaques verbales contre le Maroc ont fusé, notamment sur le registre des droits de l’Homme. D’aucuns, voulant voir dans cette lettre, non pas une volonté américaine d’appui au déblocage de la situation, mais une forme de manipulation et de chantage exercés sur le Maroc, y sont allés de leur petite thèse. Selon eux, Barack Obama cherche des pays arabes qui reprennent leurs relations diplomatiques avec Israël et l’occasion lui est donnée de commencer par le Maroc. Un paragraphe a donné lieu à cette interprétation. « Les pays arabes devraient s'appuyer sur l'engagement de l'Initiative Arabe de Paix pour entreprendre des gestes envers Israël, allant dans le sens de la fin de son isolement dans la région. J'espère que le Maroc, comme par le passé, sera un leader dans la promotion de la réconciliation entre Israël et le monde arabe », a écrit Barack Obama. Quoiqu’il en soit, les positions marocaines au sujet de l'Initiative Arabe de Paix sont claires. Tout comme celles de l’Arabie Saoudite qui en est le principal instigateur. C’est une initiative qui sera soutenue, à condition que les conditions qu’elle pose soient remplies (notamment, la paix contre les territoires). Et le dossier du Sahara n’aura pas grand-chose à voir là dedans. Mais l’avenir dira… Par ; Bahia Amrani

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire