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mardi 23 mars 2010

Sahara:" Quand on écoute les témoignages des victimes, c'est l'horreur absolu", témoigne Delphine Bourgeois


Militante des droits de l'Homme, Mme Delphine Bourgois s'interesse à la question du Sahara .Un conflit qui dure depuis trois décennies où trois pays sont concernés: le Maroc, l'Algérie et

la Mauritanie.Après

plusieurs mois de travaux en Mauritanie,cette militante des droits de l'homme nous expose ses sentiments sur ce conflit qui a aussi une dimension humanitaire...

Africaguinee.com : Parlez-nous de vos travaux sur les victimes mauritaniennes de violations des droits l’Homme ?

Delphine Bourgeois :Pour l’agence internationale pour le développement que je représente, c’est une nécessité d’être ici à Genève pour dénoncer les violations des droits de l’Homme qui ont été commis dans les camps de Tindouf (situés au sud ouest algérien, ndlr).L’idée ,c’est qu’on était sollicité par plusieurs ONG mauritaniennes. Au début j’ai hésité à me rendre sur place mais une fois en Mauritanie, j’ai entendu les témoignages des victimes, les familles des personnes disparues ou séquestrées dans les camps de Tindouf qui ont pris l’initiative de rendre public des faits qui ont touché leur dignité. Des faits qui sont gravés dans leurs mémoires qui concernent les humiliations, viols, tortures, enlèvements...
Je suis sidérée, consternée que des traitements inhumains et barbares puissent exister en ce début du XXIème siècle. Et ces violations vont crescendo dans l’horreur et varient entre enlèvements, disparitions, détentions arbitraires, sévices corporels et psychiques et même de cannibalisme ! Et donc ces victimes mauritaniennes ont décidé aujourd’hui de rompre le silence et de faire des témoignages sur ce qu’elles ont subies. Certaines victimes sont venues ici à Genève pour expliquer leur histoire à la communauté internationale. Ils demandent un soutien pour qu’une justice internationale soit rendue. Il y a donc eu des tortures, des traitements inhumains qui violent les conventions internationales sur les droits de l’Homme. Compte-tenu de l’urgence, il faut que le conseil des droits de l’homme se saisisse de cette affaire pour mettre en lumière sur cette affaire.

Avez-vous des chiffres sur ces violations ?

Nous avons répertorié 400 victimes mauritaniennes de ces violations des droits de l’Homme. Pour rappel, au début du conflit au Sahara dans les années 70, ce sont 4000 volontaires mauritaniens qui avaient rejoint les rangs du Polisario pour se battre contre l’armée marocaine. Mais après les accords entre le Polisario et
la Mauritanie

, ces personnes ont été assimilées à des traitres, des mercenaires et ils ont été arrêtés et torturés dans les camps de Tindouf. Les survivants ont été mis en cellule sous forme de tombeau où ils avaient les pieds et mains liés pendant des années. Quand on écoute les témoignages de ces survivants, c’est vraiment l’horreur absolu. Certains détenus ont eu les tendons coupés, des actes de cannibalisme…

Je pense donc qu’il faut aider ces victimes mauritaniennes au niveau du conseil des droits de l’Homme .

Avec ces témoignages,pouvez-vous nous dire qui sont les responsables de ces violations ?

Je crois que c’est la justice internationale qui identifier ces responsables. Il faut ouvrir une enquête pour que les victimes de ces atrocités obtiennent des indemnisations ou des réparations.

Avez-vous eu des contacts avec des organismes comme le CICR pour soutenir ces victimes ?

On est entrain de mener les démarches. Je pense qu’il faut que des rapports soient envoyés à tous les organismes humanitaires.

Dans ce conflit sur le Sahara, le Maroc et l’Algérie sont aussi concernés. Quels sont vos rapports avec ces deux pays, dans le cadre de vos travaux ?

Nous avons entamé au début des démarches avec ces deux pays. Mais notre démarche est de ne pas soutenir une partie contre une autre au sujet du Sahara. Notre objectif c’est de dénoncer les faits et que la justice internationale fasse son travail. Notre démarche est donc strictement humanitaire et non politique.

Certaines victimes ont –elles obtenues des indemnisations ou des réparations au niveau du gouvernement mauritanien?

Vous savez, après les différents témoignages que nous avons reçu, tout le monde était ému. Et nos démarches sont assez récentes ; par conséquent c’est après une enquête internationale que les victimes pourront bénéficier de réparation ou d’indemnisation. Nous sommes pour l’instant dans la phase de sensibilisation.

Pour terminer, un mot pour la communauté internationale ?

Il faut que justice soit rendue au niveau international. On ne peut pas laisser ces victimes dans l’ombre...

Entretien réalisé par Mamadou Kaba Souaré
Pour Africaguinee.com

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